Une soirée typique !
De retour à La Paz, nous décidons de passer une soirée dans l’une des Peñas de la ville, juste pour voir si une peña à La Paz ressemble à une peña de « chez nous ».
Des Peñas, il y en a un peu partout dans cette ville.
Aussi n’avons-nous peut-être pas choisi la meilleure adresse… Quoique ?!
Nous sommes à pied et optons donc pour un établissement proche de l’hôtel.
Un "gorille" sympathique nous fait entrer et nous souhaite une bonne soirée.
Nous montons un escalier sombre en colimaçon. A l’étage, nous découvrons une grande salle à l’ambiance très kitsch.
Presque toutes les tables sont prises mais notre serveur vêtu de noir et blanc avec pantalon, gilet et cravate, le torchon sur le bras, nous trouve une petite table, au fond, comme nous le souhaitions.
La table est recouverte d’une toile cirée rouge, crasseuse, où la bière renversée par les clients précédents colle aux manches.
Le revêtement de sol n’est pas de la première jeunesse et encore plus collant que la table.
Un orchestre anime la soirée. Quelques femmes dansent. Mais la plupart des gens sont assis autour de petites tables comme la nôtre et boivent…boivent…boivent…
Lorsque nous voulons commander un verre, nous apprenons qu’il n’y a QUE de la bière et au litre.
Nous passons un moment à observer ces femmes, certaines vêtues de robes très affriolantes, à paillettes ou très courtes, à des lieues des tenues qu’elles portent dans la rue, et ces hommes qui continuent de boire et titubent dès qu’ils tentent de se lever.
Chaque fois qu’une nouvelle bouteille arrive sur les tables, personne ne boit avant de verser un peu de bière sur le sol pour la Pachamama (voir ci-dessous).
Nous ne buvons ni ne dansons, mais passons une soirée mémorable.
Je vous en parle depuis le Nord ouest Argentin.
Il est donc grand temps d’évoquer plus précisément cette célébrité locale :
la Pachamama
(Informations extraites principalement du guide du Routard)
Pour évoquer la Pachamama, il est nécessaire de situer les indiens par rapport à la religion.
Malgré un christianisme imposé à coup de violence et d’humiliation, ces populations n’ont jamais pu croire à cette religion enseignée par des espagnols qui les volaient et accumulaient les richesses tout en prêchant la charité.
Le christianisme est par essence contraire aux religions indiennes.
Seul Dieu est supérieur aux éléments naturels, or les Indiens adorent le Soleil, la Lune, la Terre…
Dans ces régions où l’on subit la sécheresse, les tremblements de terre, les inondations, le froid…comment croire en un Dieu tout puisant, incapable de dominer la nature ?
Ainsi, les populations les plus soumises aux éléments naturels (les paysans notamment) ont conservé la foi en leurs religions ancestrales et en la magie.
Si la religion catholique est devenue celle des Indiens, sa pratique cohabite néanmoins avec le paganisme.
Un Indien ira donc à l’église et priera pour soigner son enfant, mais il consultera aussi le curandero (guérisseur).
Parmi ces croyances, la Pachamama, la Terre Mère ou Mère Nature, tient une place essentielle.
La Terre Mère est considérée comme un être vivant et il convient de lui faire des cadeaux pour s'attirer ses bonnes grâces.
Elle représente la fécondité et la source des biens matériels.
Les Indiens ont une profonde adoration pour Pachamama.
Cette divinité est censée répondre aux besoins de « ses enfants » qui la comblent d’offrandes composées d’objets rares ou chers ou de gourmandises.
Ces offrandes, appelées Ch’allah, sont le plus souvent offertes en plein champ et brûlées lors d’une cérémonie qui lui est consacrée.
La tradition de l’offrande se pratique surtout dans les communautés Quechua et Aymara. Mais il ne fait aucun doute que tous les habitants des Andes participent aux cérémonies d’adoration de la Pachamama.
En février, lors de la fête du carnaval, on remercie la Pachamama pour tous les biens qu’on possède sur terre.
Les villes qui prennent les couleurs des serpentins sont alors envahies de pétards. Ces derniers sont si nombreux et font tant de bruit qu’on pourrait se croire en pleine guérilla.
Au nord-ouest de l’Argentine, dans les provinces de Salta et de Jujuy, le rituel en l'honneur de la Pachamama s’effectue durant tout le mois d’août.
(Informations données par la jeune femme dont nous avons parlé lors de notre périple autour de Salta)
Ce rituel s’organise entre tous les membres d’un village.
Cela commence le 1er août. La coutume veut alors que l’on nettoie les maisons à fond.
Puis on mélange de la peau d’ail avec des écorces de fruits que l’on met sur la braise afin de faire fumer le mélange.
Cet encens sert ensuite à enfumer les maisons afin de chasser les mauvaises ondes.
Ils exécutent alors la Danza del Suri (autruche) autour du trou, la tête ornée de plumes, comme ces petites autruches.
La fête se termine en jouant de la musique autour de la Boca et en dansant en l’honneur de Pachamama.
S'il n'y a pas d'Apacheta, ils creusent un trou, appelé « Boca », en référence à la bouche de la Terre.
Chacun d’eux allume ensuite deux cigares qu’ils disposent tout autour de l'orifice. La fumée qui se dégage sert à purifier l’environnement et à chasser les mauvais esprits.
Toutes les personnes présentes doivent fumer pour montrer qu’elles sont saines.
Puis ils versent de l’eau bénite, pour remercier la Terre et nourrissent la bouche de céréales, de feuilles de coca et de nombreux alcools dont la chicha (bière de maïs).
L’alcool symbolise le fait que grâce à la Terre, l’Homme peut s’amuser et profiter de la vie.
Autrefois, on sacrifiait des animaux (lamas ou vigognes) mais cela ne se pratique plus, nous dit-on.
Après ces offrandes, la bouche est nourrie, on peut la refermer avec les mêmes pierres si l’apacheta était déjà là, ou avec de nouvelles.
C’est alors l’occasion pour chacun de faire un vœu ou une prière.
Un autre dieu est célébré : E’keko, dieu du foyer.
Ce petit lutin gras et bossu porte sur ses épaules tous les éléments du bonheur terrestre (de la farine à la belle Mercedes).
On le célèbre le 25 janvier de chaque année. C’est la fête des Alasitas.
Tous les Boliviens, quelque soit la classe sociale, achètent alors des miniatures, répliques de nourritures et de biens matériels, et les portent à l’église pour les faire bénir avant de les offrir à E’keko.
El Mercado de Hechiceria
ou
Le marché des sorcières
En flânant dans les rues du centre de La Paz, on passe forcément dans ces rues où les boutiques d’artisanat voisinent avec des étalages de produits étranges.
Sur ces étals, on peut trouver tout ce qui peut influencer les esprits malveillants ou bienveillants de l’univers aymara.
Les becs de toucan séchés, par exemple, soignent et protègent des mauvais esprits.
Mais le plus sacré pour les Boliviens, c’est le fœtus de lama.
Il est utilisé en agriculture pour éviter que la Pachamama ne prenne ombrage des sillons creusés dans la terre. Le sang du lama est répandu dans les sillons pour l’apaiser.
On l’enterre aussi dans toutes les fondations des maisons. Cette Cha’lla (offrande à la Pachamama) porte chance.
En Bolivie, on enterre un fœtus de lama jusque sous les ponts, même quand on a un diplôme d’ingénieur.
Pour chasser les mauvais esprits, on trouve aussi dans ces rues toutes les graines, herbes séchées et diverses parties d’animaux appropriées.
Et si l’on souhaite des conseils sur ces plantes ou connaître son avenir, il suffit de demander aux Yatiris (sorcières) qui se promènent dans la rue coiffées d’un chapeau sombre et portant des sacs de coca.
Ce marché aux sorcières propose toute la panoplie des offrandes
à la Pachamama
ou à E’keko.
Il y a même des faux billets.
A propos de marché, il en est un que nous ne voulons pas louper dans la région.
C’est le marché d’El Alto . . .
Le marché d’El Alto
Dimanche 16 mai
El Alto, situé sur les hauteurs de La Paz, semble être le quartier haut de la ville.
En fait, il est plus que cela.
Peuplé à l’origine de paysans, et de migrants de tout le pays, El Alto est devenu une ville à part entière.
Avec plus d' 1 000 000 d'habitants et une croissance de plus de 5% par an, El Alto est considéré comme la capitale mondiale de la population Aymara.
La grande majorité de la population indienne pauvre réside à El Alto.
Nous prenons un bus de ville pour monter depuis La Paz vers El Alto.
La côte pour El Alto semble ne jamais vouloir finir.
Toutes ces bâches bleues sont le signe que nous arrivons.
Nous sommes à El Alto
Lorsque, enfin, nous descendons de l’autocar, nous nous retrouvons au milieu d’une foule immense.
Ce marché qui a lieu 2 fois par semaine à El Alto s’étale dans toutes les rues et sur la place.
On y trouve tous les produits imaginables. Alimentation, vêtements, électronique, voitures, pièces détachées, pneus, quincaillerie, animaux…
Evoluer dans certaines rues tient de l’exploit.
El Alto a la réputation d’être dangereuse pour les touristes. Aussi ne croisons-nous qu’un couple d’allemands, tellement surpris eux aussi de nous voir qu’ils s’arrêtent quelques instants pour discuter.
Même si nous ne portons aucun appareil photographique sur nous, notre peau à elle seule indique que nous sommes des touristes.
Pourtant, nous avons déambulé dans toutes les rues de ce marché et, à aucun moment, nous n’avons senti un quelconque danger.
Mais peut-être avons-nous eu de la chance.
De fait, nous ne regrettons pas d’avoir fait le déplacement car l’ambiance y est vraiment particulière
Après ce marché, nous nous rendrons à un spectacle très spécial et très typique.
Aussi devons-nous, auparavant, vous présenter la Cholita . . .
(photos prises sur la même route, lors de notre visite de Tiwanaku)
Nous traversons tous les quartiers populaires de la sortie de la ville.