7 heures – Debout !
Difficile de sortir du frigo pour entrer dans le congélateur.
Après un petit-déjeuner express, la toilette est encore plus rapide. En fait, chacun de nous se contentera d’un brossage de dent.
Les sacs sont chargés sur le toit, ainsi que le réchaud et les casseroles. Ema a soigneusement enfoui le repas du jour sous des torchons, dans le coffre de la voiture.
Après cette première nuit, Sergio est rassuré de voir que nous sommes tous prêts à l’heure prévue pour reprendre la piste.
Ce matin, nous ferons notre entrée dans la Réserve Nationale de la faune Andine, créée en 1970 et couvrant 7150 km2.
Les superbes « Lagunas* » vont se succéder, avec leurs eaux d’un bleu-vert sublime ou d’un rose-rouge surprenant, la couleur variant selon les minéraux contenus dans l’eau, mais aussi en fonction du vent.(*) « Laguna » n’est pas une lagune telle qu’on la désigne en français. « Una Laguna » est un lac fermé. Ses eaux ne s’écoulent dans aucune une rivière.
Contrairement à la veille, il fait grand beau temps. Le ciel est dégagé mais l’air reste très frais.
Volcan Uturuncu (6008 m)
Même ici nous trouvons des « apachetas »
(pierres posées sur un monticule, exprimant un vœu ou un hommage à la Pachamama)
Hum !
Sergio, seguro que es el camino justo ?
(...tu es sur que c’est la bonne route ?)
Si, si ! No se preocupen !
(oui, ne vous inquiétez pas !)
Laguna Hedionda Sur
Sergio nous accorde 10 minutes.
Le temps de quelques photos, nous sommes déjà remontés dans le 4x4, tant le froid nous glace le sang malgré le soleil.
Chaque laguna sera une merveille. Pourtant, chaque fois, nous ne pourrons tenir dehors plus de quelques minutes.
Nous finirons même par prendre des photos depuis la voiture, prenant soin aussitôt prises de refermer les vitres.
Quant aux "arrêts pipi" dans ces paysages désertiques, exposés aux 4 vents, sous une température largement en dessous de zéro et sans un buisson à la ronde …
Je vous laisse imaginer !
Nous avons la chance d’être accompagnées d’hommes discrets.
Mais la discrétion ne donne pas chaud aux fesses !
Kollpa Laguna
Cette laguna porte le nom de ces briquettes blanches (extraites par ces hommes que l’on voit au loin), la Kollpa.
Impossible de trouver la traduction de ce mot. Nous savons seulement que la kollpa est utilisée pour fabriquer des détergents et des shampoings.
Devant nous, la Laguna Polques
Ces paysages sont sublimes.
Nous sommes au Salar de Chalviri et aux thermes de Polques.
Ce Salar est une halte pour le bain dans cette petite piscine où l’eau est à plus de 30°C.
Mais nous y reviendrons pour le déjeuner. Il n’est que 10 heures, nous avons le temps d’aller jusqu’au célèbre désert de Dali et vers la Laguna Verde . . .
El Desierto de Dali
Après le col, à 5000 mètres d'altitude, la piste continue encore de grimper.
Sur ce versant, de grandes pierres sculptées par le vent semblent avoir atterri là, on ne sait comment.
C’est totalement surréaliste. Inutile de se demander pourquoi cet endroit s'appelle le Désert de Dali.
Sommes-nous encore sur la planète Terre ?
Nous montons à 5400 mètres d’altitude.
Non, non, il n’y a pas d’erreur, c’est bien 5400 mètres !
Rappelons que le Mont Blanc, plus haut sommet d’Europe, fait 4807 mètres. Et nul ne parviendra jamais à monter jusqu’à son sommet en voiture (!?).
Sergio n’est pas certain de pouvoir aller jusqu’à Laguna Verde, une des plus belles laguna de la région.
Poussée par le vent, la neige dévale des montagnes et s’abat sur nous avec violence.
Téméraire et excellent conducteur, Sergio continue.
Soudain, notre Toyota quitte la piste. Il monte sur les buttes de neige qui se forment de chaque côté.
Nous sommes secoués mais Sergio maîtrise le véhicule, le stoppe et descend.
La poisse - Nous avons crevé !
Tout le monde dehors !
Nous gelons sur place. Seuls Sergio et Rémy semblent résister au froid.
Il faut vider le coffre pour prendre la roue de secours. Parfois, des bourrasques de neige viennent nous fouetter.
Nous sommes seuls dans un paysage de rêve.
Alors que 15 ou 20 véhicules se suivent chaque jour, au départ d’Uyuni, nous n’en avons croisé aucun depuis Tupiza.
Les Andes nous appartiennent.
Même si nous en payons le prix, cette halte imprévue nous rend tellement heureux.
La roue est en place. Tout le monde est congelé.
Nous repartons en priant pour ne pas crever une seconde fois. Nous n’avons pas d’autre roue.
Au fil des kilomètres, Sergio est de plus en plus craintif et semble vouloir rebrousser chemin.
« C’est risqué, nous dit-il. Nous ne pourrons pas aller jusqu’à Laguna Verde. »
Mais, à l’unanimité, nous insistons. Cette Laguna nous a été vantée par l’agence. Nous voudrions bien la voir.
De plus, nous avons entendu dire que certains guides aiment à écourter les journées en évitant certains sites. Nous sommes donc un peu méfiants.
Sergio poursuit donc, très concentré sur la route. Nous ne savons pas si nous l’avons contrarié.
Laguna Verde
La couleur de l’eau est surnaturelle. Quelle pureté !
Note : Cette couleur est due à la présence de bicarbonate de plomb, de souffre, d’arsenic et de calcium.
Il fait toujours aussi froid mais c’est tellement beau. Cette fois, nous ne résistons pas au désir de mettre les pieds dans ce décor de rêve.
Ce vent glacé qui souffle en permanence sur ce lac provoque la formation d’une écume brillante qui étincelle sur sa surface.
Au fond, le volcan Licancabur (5916 m)
Juste derrière se trouve le
désert d’Atacama.
« Nous avons beaucoup de chance, nous dit Sergio. Il est rare que l’on puisse venir jusqu’ici. »
Cela, l’agence nous l’avait bien caché. Or, pour rien au monde nous n’aurions voulu louper cette merveille.
Un peu plus loin, avant de retrouver les thermes de Chalviri, Sergio stoppe le véhicule pour une photo souvenir.
Notre chauffeur est fier de lui et veut pouvoir montrer « qu’il l’a fait ».
Mais oui Sergio, elle est réussie la photo !
Nous réalisons alors que ses craintes étaient peut-être plus fondées que nous le pensions, mais nous avons pu constaté aussi combien il était bon conducteur.
Nous sommes sur le Salar de Chalviri, aux thermes de Polques.
C’est l’heure du bain ! . . .
Dès que nous nous éloignons du col, le temps s’améliore peu à peu. Puis, sur le Salar, le ciel est totalement dégagé.