La  vie à Hann Plage

 

 

Mardi 4 septembre 2007

 

 

 

C’est la rentrée des classes.

 

Les 7 colis du CNED sont arrivés directement à Dakar, sans encombre cette fois, si ce n’est qu’il nous a fallu nous rendre à la poste afin de retirer certains paquets de cours.

Pourquoi pas tous ? Aucune idée !
Après avoir visité un nombre incalculable de bureaux des douanes, rencontré autant de "responsables", les pieds sur la table ou la tête dans un journal, levant le nez pour apposer chacun son tampon, nous avons pu, enfin, récupérer auprès d’un employé des postes nos colis contre une somme que nul n’a pu justifier si ce n’est par «c’est le règlement » (le coût étant de 1000 francs CFA par colis et des pénalités de 200 CFA par jour sont appliquées pour tout colis non réclamé dans les 8 jours).

Maintenant, au boulot Candice !

Chaque après-midi, notre lycéenne va donc à l’école.

Le matin, si le vent veut bien faire tourner notre éolienne, saisie des contrôles à bord.

Note : Il semble que de gros progrès aient été faits de la part du CNED qui permet cette année de télécharger tous les cours sur Internet et d’envoyer de la même manière la plupart des contrôles.

L’après midi notre élève, le sac sur le dos, prend la navette.
 
 
 
  
Installée sur la banquette du CVD ou encore dans un hamac, elle peut alors travailler.
   
         

Quand elle ne discute pas avec Pierre, Paul, Jacques, ou encore Omar, Badou ou Mamadou !!!

      …ou ne se fait pas "bichonner" par ces dames !

      
          
          
(Merci encore à Jacques, Karkaila, pour ces magnifiques photos)

Quelle vie !!!

Si besoin, elle n’hésite pas à déranger Papa – pardon le Prof. – qui souvent n’est pas bien loin, lorsqu’il n’a pas la tête dans les fils électriques ou dans les toilettes (voir plus loin).

  

Ou encore Maman, lorsqu’elle daigne rallier la terre.

C'est-à-dire si les corvées habituelles sont enfin terminées et si l’énergie à bord – bien rare hélas – lui interdit de profiter d’un moment de tranquillité pour rédiger vos futures pages de lecture.

  Ne pas déranger !!!

Et le CVD me direz-vous ?
La musique à fond, pour la concentration, il y a mieux !

Chacun s’étant réparti les matières selon sa patience et ses affinités – ou presque !?! - comme les 2 années précédentes.

On ne change pas une équipe gagnante !!!

Le BAC de français pointant son nez à l’horizon, le commentaire de texte nous donne quelques sueurs.
Heureusement nous trouvons en Jean-Yves, un voisin de mouillage très littéraire, une aide précieuse.

Nous passerons toutes deux quelques après-midi à écouter ses conseils, tentant de maîtriser cet exercice de style difficile auquel nous sommes quelque peu réfractaires.

Une grande nouvelle : Depuis notre arrivée, Candice se lève de bonne heure.

Ceci dit, à Dakar, nous nous levons tous assez tôt.

Enfin, pas trop non plus, il ne faut pas exagérer !!!

La navette cessant dès 21h45 et les journées caniculaires étant épuisantes, nous avons très vite pris le rythme.
Durant toute la journée, nous espérons la pluie et si elle ne vient pas, nous avons parfois envie de mettre …

 
  Bon, ben… puisque ça ne rentre pas…

…on se contentera  des pieds !!!  

Lorsque le cockpit devient intenable, nous allons nous réfugier au CVD, à l’ombre des arbres ou sous les ventilateurs du bar devant une bonne menthe fraîche. Le réfrigérateur de Vent de Folie faisant ce qu’il peut sous 35°C.
Profitant de ces allers-retours, nous prenons une bonne douche froide  dont l’effet bienfaiteur s’évanouira en quelques minutes, et remplissons quelques bidons d’eau.

Bref, nous traînons les savates comme les autochtones.

Que ceux qui pensent que les Africains ne sont pas très courageux revoient leur jugement !
Allez travailler énergiquement sous cette canicule !

Les pirogues et la pêche


(photo de notre amie Dany)
A Hann Plage, la principale activité est la pêche.
Chaque jour des pêcheurs solitaires passent près de nous, ramant dans de petites barques de bois dont les francs bords émergent à peine.
 
 
      

Ils partent en mer, de l’autre côté de la presqu’île.

Dans le mouillage près de Vent de Folie, des hommes plongent chaque jour sans relâche, du matin au soir, avec un simple masque et une paire de palmes afin de ramasser des escargots de mer.
Durant ce temps, parfois, un petit garçon joue toute la journée, en plein soleil, dans cette petite embarcation.

  

Les pêcheurs sur les pirogues tirent durant des heures ces filets énormes pour ne remonter que quelques rares poissons.

Certains après-midi, nous sommes aux premières loges pour assister à une partie de pêche au filet (senne).

Le soir, les pirogues, immenses et majestueuses, passent moteur à fond ou s’installent dans ce mouillage et jettent l’ancre autour des voiliers jusqu’au petit matin.

En leur centre, une flambée, probablement pour chauffer le thé, se met alors à crépiter et la soirée se passe ainsi  à palabrer ou à chanter au son du tam-tam.

Installés dans le cockpit, toute lumière éteinte et les jambes enduites de produit anti-moustique, nous savourons ces instants en silence.

(photos de Dany)

Dès l’aube, chaque pirogue rejoint la plage où se trouve le marché au poisson, nous saluant au passage.

 
 

Lorsque les pirogues nous abandonnent, ces messieurs les pélicans les remplacent, glissant placidement sur l’onde.

 

Nous constatons avec tristesse combien la plupart de ces hommes, très jeunes et beaucoup moins jeunes, exercent des travaux pénibles afin de ramener quelque pitance à la maison.

En ville, tous vendent tout et n’importe quoi, espérant gagner suffisamment pour assurer le repas du soir.

Et je passerai sur le traitement infligé aux employés par certains patrons.

Anecdote qui prouve que l’esclavagisme est encore une bien triste réalité :
Un matin, de bonne heure, une pirogue passe près de nous.
Le patron – noir - très en colère bat à grands coups de corde l’un de ses équipiers – noir également - d’un âge certain et hurlant, durant plus de 20 minutes.

Comment oser dire, après de tels constats, que ce peuple n’est pas courageux ?

Et nous sommes hélas certains, dans la suite de notre découverte de ce pays, d’être témoins d’autres scènes de ce genre et de constater d’autres preuves de ce courage.

Petit « coup de gueule » en passant.

Nous avons – Rémy et moi - déjà été choqués par le comportement de certains toubabs envers cette population. Comportement qui nous rappelle, hélas, les attitudes de certains européens en Tunisie ou au Maroc.

S’il est possible ici, en effet, de déléguer toute corvée et de participer dans le même temps à la survie d’une famille, certains toubabs (pas tous fort heureusement) estiment trop souvent à notre goût qu’il peuvent abuser sous prétexte qu’ils  paient et que la pauvreté de ces gens les contraint à tout accepter.

Nous entendons aussi des propos insupportables comme « tous des voleurs… tous des menteurs…tous des fainéants… »

La France serait-elle devenue, depuis notre départ, un modèle de civisme et de courage ?

Ne leur devons-nous pas, pourtant, plus de respect qu’à d’autres ne serait-ce que pour nous faire pardonner des années d’esclavagisme ?

Et si nous n’aimons pas ce peuple – chacun étant libre dans ses opinions - que venons-nous faire dans leur pays ?

Alors que nous relisions cette page, Rémy et moi hésitions à laisser ce « petit coup de gueule », peut-être un peu impulsif.
Mais très vite après ce questionnement, un fait vient étayer ces lignes :

Anecdote : « Tel est pris qui croyait prendre ! »  - ou - La honte !

Plusieurs jeunes sénégalais, travaillant au CVD (gardiens de nuit sur les bateaux en l’absence des propriétaires pour la plupart), demeurent toute la journée, entre eux, sur un banc, devant les ateliers. Soit à l’écart du lieu de vie des toubabs, à tel point que nous ne les croisons qu’au portail.

Nous pensions qu’ils souhaitaient rester entre eux – Pas du tout !

Une excellente idée à germer un jour dans la tête de certains toubabs : Que le règlement stipule que ces employés ne restent pas au CVD lorsqu’ils ne travaillent pas.
Revers de médaille : Un soir une belle tornade sévît sur le mouillage et aucun employé n’était présent pour sauver les bateaux s’échouant sur la plage.

Le règlement autorisa de nouveau la présence des Sénégalais dans le club.

Mais ces derniers se l’entendirent pour dit.

Depuis, ils restent au CVD mais à l’écart, s’abstenant de croiser les toubabs, tels des pestiférés.
Mais si vous souhaitez faire leur connaissance, vous serez les bienvenus devant l’atelier de Diego, seul endroit ombragé hors du passage des toubabs, où ils passent le temps, prennent leurs repas et boivent le thé en attendant de réintégrer leur poste ou de vous venir en aide si besoin.

Inutile de préciser combien nous avons honte d’être toubabs en de telles circonstances.

ERRATUM : A propos de toubab, je tiens à corriger une bêtise notée sur ma dernière page.
On appelle « toubabs » tous les blancs,
par contre les blancs vivant au Sénégal se nomment
les « Sénégaulois ».

J’adore ce terme !

 

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