Jeudi 20 mars 2008

Après une soirée « pizza aux crevettes » à la Pointe St Georges, nous nous dirigeons vers Kachouane pour les fêtes de Pâques.

A l’approche de Karabane, juste au carrefour des bolongs, les fonds baissent… baissent…et baissent encore…

Vent de Folie est "planté".

Mais cette fois, la dérive étant déjà relevée, rien à faire.
Et oui ! On prend confiance et voilà ce qu'il arrive !
Et notre sondeur, me direz-vous ?

Il semble qu’il ne veuille plus  descendre en dessous de 1m 90… quand il fonctionne.
De toute manière, lorsque l’on navigue à marée basse, même avec un sondeur efficace, il est parfois trop tard pour réagir.

Et avouons que les marées, nous n’en tenons plus vraiment compte pour prendre un départ. Puisque, quelle qu’elle soit, nous aurons toujours le courant contre à un moment du parcours.

Note (pour les néophytes dont je faisais partie il y a quelques temps encore) : Si le courant descend (vers la mer) dans le cours principal, il descend forcément aussi dans le bolong que nous prendrons ensuite.

Cette fois, nous sommes en marée montante. Il ne nous reste qu’à attendre.
Une heure passe - Nous sommes toujours "plantés".

Rémy n’y tient plus. Il décide de faire une tentative avec l’annexe.
Il pousse moteur à fond. De mon côté j’accélère également.

Les 2 moteurs ronflent…

La vase tourbillonne à l’arrière de Vent de Folie
C’est bon ! On est sortis.

   
  
Héééé !!! Attends-moi !!!

Kachouane - Vendredi 21 mars.

Nous avons retrouvé notre place devant le Sounka, bercés chaque soir par la voix du muezzin, ou plutôt l’Imam car ici, point de muezzin pour appeler à la prière.

Une pirogue nous rappelle le pays :

À propos de pirogue, un petit "erratum" sous forme d’anecdote.

Anecdote : Accent diola ou problème auditif ?!    

À Karabane, il me semble, renseignement pris auprès d’un ami diola,  je vous disais que cette pirogue creusée directement dans un tronc de fromager se nommait « pirogue arabe ».

 Dernièrement, au cours d’une discussion, nous réalisons que cette pirogue est appelée, non pas « pirogue ARABE », mais tout simplement «pirogue A RAME » !!!

Nous prenons un café dans le cockpit. Quelqu’un nous appelle depuis la plage.

Cette fois ce ne sont pas les enfants, ils sont à l’école.
C’est Frédéric, rencontré à Oussouye.



Nous sommes ravis de te revoir Frédéric !

Frédéric n’est jamais monté sur un voilier. Nous lui proposons de l’embarquer pour Ehidj dimanche, où nous avons décidé de partager le repas de Pâques avec nos amis.

  

Pâques à Ehidj - Dimanche 23 mars.
Nous arrivons juste à l’heure pour l’apéro !

Des "toubabs" passant la plupart de leur temps à Ehidj sont présents.
Notre cher ami Antoine (voir Ziguinchor) est là lui aussi. Il est venu passer ces fêtes avec sa famille et semble très heureux que nous ayons décidé de nous joindre à eux.

Tous - les hommes bien sûr ! - sont installés autour du pot de bounouk.

   

À propos du bounouk - Quelques règles sont à connaître :

Lorsque l’on prend une louche de bounouk, on ne la passe pas à son voisin.

Il faut tout boire. Sinon, prévoir d’en prendre une moindre quantité dans le cobot ou encore verser ce qu’il reste sur le sol.
On repose ensuite le cobot sur le pot de bounouk.Le voisin peut se servir.

Pourquoi ?
Pour éviter l’empoisonnement.
Et c’est tout à fait sérieux.

Si les personnes réunies pour partager le bounouk forment un cercle un peu grand, penser de temps à autre à déplacer le pot afin que tous puissent se servir aisément.

Ceci dit, si vous n’y pensez pas, n’ayez crainte, ils se serviront quand même !

Vous voyez ! On devient des « pros » du bounouk.
Enfin… Rémy surtout !

Tandis que ces messieurs palabrent devant leur vénérable breuvage, ces dames préparent le repas pour la famille Soumare.

C'est-à-dire pour tout le village.
Des bassines d’oignons à peler et couper. La viande mijote dans les marmites.
   
  
A savoir :

Tout en pelant oignons et pommes de terre, souhaitant dédommager qui de droit pour ce repas, j’interroge les femmes sur le partage des frais lors de ces repas de fête pris en commun.
Cécile, une des sœurs de Léon, m’explique que les femmes paient le cochon, les poulets, fournissent les légumes ainsi que le riz.

Et les hommes ?
« Les hommes, ils apportent le bounouk !
»

Chacune de ces femmes s’acquitte donc en moyenne de 1500 à 2000 CFA pour sa famille. Tandis que les hommes portent quelques bouteilles installées la veille sur l’écorce d’un palmier.

Encore un partage très équitable !?!

15 heures - Le repas est prêt.

À table !

Durant cet excellent repas,  la famille Soumare nous proposera de goûter du singe.

La pauvre bête étant déjà morte, autant ne pas mourir idiot.

Est-ce son goût très fort ?

Est-ce l’idée de cette pauvre bête abattue par l’un de nos semblables alors que nous aimons tant observer ces animaux pleins de vitalité ?

Le fait est que je n’apprécierai pas vraiment cette viande.

Dans l’après midi, un jeune homme en costume et cravate, très élégant, arrive.

« Bonjour. Je suis le Ministre des affaires inutiles. »

Notre imposteur demande un traducteur et, comme s’il se lançait dans un discours en diola, les gestes accompagnant largement les paroles, nous raconte une histoire.

Succès et fou rires garantis.

Même si rien ne peut égaler son humour et ses imitations du coq, en voici un résumé très succinct.

« Autrefois, nous n’avions pas de montre.
Le coq chantait. Les femmes se levaient alors et pilaient le mil :
Tap – tap –tap
C’est ainsi qu’étaient marquées les secondes et que l’on savait l’heure »

Après cette très agréable journée, nous devons quitter nos amis.

Ce soir, la maison des jeunes de Kachouane ouvre ses portes – et surtout sa chaîne stéréo !
Impossible d’y échapper !!!

   Elle est pas belle la vie ?… 

Frédéric semble ravi de ce baptême en voilier au cœur de la mangrove.

Salut Frédéric !

Nous avons adoré ta compagnie, ta sincérité et ton humour.
Peut-être à un de ces jours, sur d’autres rivages  …

Lundi 24 mars – Pâques à Kachouane

À Kachouane, les fêtes de Pâques sont un peu "tombées à l’eau".

La chorale de Djembering devait animer la messe et la soirée. Kachouane offrait le bounouk, Djembering le cochon.

Mais à Djembering, la caisse a disparu ou peut-être était-elle vide ?!

Le fait est que, n’ayant pu acheter le cochon, ces jeunes gens du village voisin ne viennent pas.

De plus, les vacances des étudiants se voient réduites au week-end.

Il faut rattraper les jours de grève – nombreux ces derniers temps.
Les élèves n’auront donc que le lundi de Pâques puis reviendront pour la fête nationale, le 4 avril.

Toutefois, après une longue et "trèèèès" musicale soirée à la maison des jeunes la veille, tous partagerons le repas de Pâques.

Puis petits et grands nous proposeront le rituel spectacle d’Econcone (danse et lutte).

 

Une nouvelle lutteuse à Kachouane !?!

Cette journée de Pâques se déroule donc tranquillement, entre repas, palabres et bounouk, au campement de Papis et Aurélie.

Nous partageons le traditionnel plat de riz et cochon en compagnie des hommes.
Les femmes mangent de l’autre côté de la palissade, entre elles, près des chaudrons où elles ont cuisiné toute la matinée.

Le soir, chacun rentre chez soi.

Seuls demeurent les quelques catholiques qui partageront de nouveau le riz et les restes de viande et palabreront - encore et toujours - tard dans la soirée, réchauffés par le bounouk qui coule à flot.

Je dis bien réchauffés car, ces jours-ci, il fait "frisquet".

Un fort vent de nord ouest souffle en permanence, rendant l’accès à la plage difficile et le mouillage très rouleur.

Pour terminer nos travaux... Dur dur !

 

Nous en viendrons à bout néanmoins et le résultat nous satisfait pleinement.

En ce 27 mars 2008,
je puis vous annoncer officiellement que les travaux sur Vent de Folie sont terminés…
. . . disons… pour l’instant !!!


  

Nous pouvons désormais profiter pleinement de nos journées.

Les unes à poursuivre leur course contre la montre.
M’sieur…    M’sieur… !
La récréation étant l’occasion de s’ébattre dans l’eau avec les copains !
Issa et Babakar.

Venez goûter les enfants !!!

Si les enfants ne pensent qu’à s’amuser, il faut bien une personne reponsable pour penser au repas du soir (!)

Notre ami Ibou, pêcheur occasionnel venu nous offrir l’un de ses plus gros poissons, vient de participer au championnat national de judo.
Félicitations Ibou pour ta médaille de bronze !

Côté cuisine, personne n’a encore pris ma place et je le déplore.
 Mais  en ce qui concerne le nettoyage, j’ai provisoirement abandonné.

Le vent a faibli.

Désormais, c’est un vent provenant du désert, accompagné, matin et soir, d’une brume épaisse qui souffle sur tout le Sénégal.
Ce vent emporte avec lui une poussière marron et tenace recouvrant le pont, les cordages, les haubans et pénétrant même à l’intérieur.

Toute tentative d’en venir à bout étant vaine, nous capitulons.

Nous allons rendre visite à nos amis.
Retrouvailles chaleureuses avec Djeynaba et Mariama.

Puis Simon, auquel nous avions promis de venir visiter son nouveau bar-restaurant.

Le Beaulieu Bar Restaurant se trouve de l’autre côté, à Ebounkoute.

À Ebounkoute, des femmes passent des journées entières à ramasser des huîtres dans la mangrove.
Puis, abritées sous les arbres, elles les font bouillir, les débarrassent de leurs coquilles et les font sécher pour les vendre.

  
Une journée "trempette" pour notre Capitaine.

Cette semaine, nous avons des voisins dans le mouillage.

Jean Philippe est belge. Sabrina est tunisienne.

Nous sommes heureux de parler de ce pays que nous avons tant aimé et salivons à l’évocation de la bonne cuisine tunisienne.

Une pensée affectueuse, en passant, pour notre jeune ami Saber que nous n’oublions pas !

Et puisque l’on parle "bouffe", le stock de légumes diminue et la viande commence à nous manquer.

Rémy se dévoue donc pour un voyage à Elinkine à bord du zodiac de Jean-Philippe.

Sabrina et moi laissons nos places sans aucun regret.
Encore moins lorsque nous les verrons revenir, trempés jusqu’aux os, patates, choux et œufs baignant dans 30 cm d’eau.

Vendredi 29 mars - Nicolas nous sauve la vie !

Dans la matinée, Nicolas de Karabane nous fait une visite surprise.

Tout en discutant, Nicolas remarque des cajous sur la table du carré.

Nous lui expliquons que ces cajous sont un cadeau des enfants de Djiromaït, mais que nous n’avons pas encore pris le temps de les faire griller dans le four du bateau.

« Ooooh là là !!!
Surtout pas
- nous dit Nicolas - vous allez faire exploser le bateau !

Dans la coque, il y a un jus. C’est comme de l’essence. Lorsqu’on les fait griller, elles prennent feu et explosent.
Ici, on les fait griller le plus loin possible de toute habitation. »

Atention : Autre précaution à prendre, ne pas croquer la coque d’une noix de cajou. L‘essence contenue entre celle-ci et la noix, responsable de l’embrasement instantané vu plus haut, brûle.

Nous en avons des sueurs froides.

Les coucous.   
Curieux que nous sommes, nous voulons vérifier les dires de Nicolas.

Ici, ce sont les enfants qui font griller cette gourmandise.

Nous allons chez Djeynaba et demandons au jeune Momodou de nous montrer la cuisson des coucous (noms donnés aux cajous).

Momodou, suivi de toute la bande que nous formons avec les autres enfants de la famille,  prend les choses en main.
Il s’éloigne de la maison. Prépare le feu sous une vieille bassine.

Mariama et Rhadi ventilent le feu. Yenkouba, adorable enfant sourd muet toujours soucieux d’attirer l’attention, met la main à la pâte.

Les enfants posent le plat de coucous sur le feu.
On attend...

Les enfants sont un peu trop près à mon goût.
Mais bon !

Momodou prend alors un petit bout de bois dans la braise et le jette dans les coucous.

   « Sinon, ça grille pas ! »

Soudain, les coucous s’enflamment et certains sautent à quelques mètres.

Momodou enlève le plat du feu et durant plusieurs minutes, les coucous poursuivront leur feu d’artifice jusqu’à devenir tels du charbon.

Les enfants jettent alors les coucous sur le sol et les couvrent de sable.

Les coucous refroidissent. On fouille le sable pour les retrouver.

Il faut encore ouvrir la coque.

C’est encore le rôle des enfants.
Chacun prend une pierre. Les noix sont ouvertes.

C’est l’heure de se régaler.

Anecdote : Les grands d’abord !

Les enfants ont fait griller nos noix. Aux nôtres, ils ont même ajouté les leurs, ramassées par ci par là.
Ils ont patiemment cassé la coque de chacune d’elles.
Ils tendent alors le plat à Djeynaba qui distribue quelques miettes, très équitablement, à chaque enfant puis nous tend les jolies noix, entières, encore chaudes, aussi grosses qu’appétissantes.

Ce sont nos noix… !?!

Nous devrons insister pour que les enfants, comme les adultes, , veuillent bien entendre que ces jolies noix sont pour tout le monde et qu’ils sont bien les premiers à les avoir méritées.

Nous venons de passer des instants fabuleux à partager la joie et le savoir de ces enfants.
Par la même occasion, nous avons pu vérifier combien nous devions à Nicolas de pouvoir regagner notre cher Vent de Folie.


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